Loin de jouer l'apaisement, la Municipalité de Nyon met de l'huile sur le feu

de: SSP Vaud

La crise à la Ville de Nyon continue et s'approfondit.

Communiqué de presse du SSP sur la situation à la Ville de Nyon

Loin de jouer réellement l’apaisement, la Municipalité approfondit la crise

Depuis plusieurs semaines, la Municipalité de Nyon multiplie les déclarations selon lesquelles la crise du personnel communal serait désormais surmontée et serait venu le moment de l’apaisement. Les réunions «informelles» (donc non verbalisées) convoquées par la Municipalité avec différents acteurs ne saurait être une manière de régler les graves problèmes que connait toujours une partie de l’administration communale. Bien au contraire, la Municipalité semble plutôt se préparer elle-même à rajouter de l’huile sur le feu.

En effet, selon les informations en notre possession, la Municipalité s’apprête à licencier la Cheffe de l’ancien Service informatique, l’une des plaignantes. Ce Service a en effet été supprimé et remplacé par un Office par décision de la Municipalité, juste après les élections communales de l’an dernier et juste avant l’entrée en fonction de la nouvelle Municipalité. Ce service a été transformé en Office et placé sous la direction…. du Secrétaire municipal. Cette conversion en version « minimaliste » a de quoi surprendre, dans une période où certaines communes vaudoises ont fait l’objet d’attaques informatiques et auraient plutôt besoin de renforcer et professionnaliser les dispositifs informatiques. Si ce service a été supprimé en tant que tel, c’est parce que sa Cheffe est dans le viseur de la Municipalité. D’ailleurs, toujours selon nos informations, les problèmes de gestion et de développement de ce nouvel office se sont, depuis, multipliés, dans un climat de tensions et de défiance.

Pour rappel, le Service juridique avait lui-même fait l’objet d’une restructuration comparable à la suite de l’éviction de sa Cheffe d'office. Cet office est venu s’ajouter aux attributions – là aussi essentielles pour un organisme public – placées sous le contrôle du Secrétaire municipal.

Toujours selon nos informations, le Secrétaire municipal a repris pleinement son poste de travail ce 4 avril. Rappelons que, pour ses comportements et agissements qualifiés de «graves» par le rapport Muller, le Secrétaire municipal a reçu un blâme de son employeur. Pour solde de tout compte?

Nous avons également appris qu’une employée de l’administration, qualifiée par l’enquête de l’ancien juge Muller de «irréprochable», s’apprête à devoir faire face à l’alternative entre un déplacement dans un autre service ou le licenciement, en raison du simple fait - admis et reconnu par la Municipalité - que le Secrétaire municipal (dont l’enquête ne disait pas qu’il était, lui, «irréprochable») considère qu’il n’est plus en mesure de travailler en collaboration avec elle. Difficile dans ces conditions de prétendre que la mesure envisagée à l’encontre de cette employée aille dans le sens de l’apaisement: elle accentue la crise et met tout en place pour que les problèmes et les souffrances passées se reproduisent à l’avenir et continuent autant que possible à être passées sous silence.

Rappel des plaintes

Pour rappel, à l’été 2021, six femmes, collaboratrices et cadres de la Ville, ont présenté des plaintes auprès du Service des ressources humaines. Toutes visent les comportements du Secrétaire municipal et mettent en lumière l’absence de soutien ou de réaction de la part de la Municipalité. Ces plaintes ne sont pas isolées ni nouvelles, elles font suite à plusieurs situations similaires, individuelles ou collectives, parvenues à la Municipalité ces dernières années et ayant pour la plupart conduit au départ des personnes à l’origine de signalements impliquant ce même cadre. Ces plaintes étaient connues de la Municipalité. Elles s’inscrivent dans un contexte général de turn-over très élevé qui s’illustre notamment par les départs successifs de nombreux/euses chef·fe·s de services au cours de ces dernières années (voir plus bas) et aussi d’un bon nombre d’employé.e.s au sein même du service du Secrétaire municipal.

De surcroît, loin de confirmer les prétentions municipales à l’apaisement, deux des six plaignantes de l’été 2021 n’ont jamais été entendues en tant que victimes par la Municipalité ou par l’enquêteur. Si, pour l’une d’elles, sa démission intervenue entretemps explique cet «oubli», la seconde a, elle, réitéré sa demande d’être entendue à maintes reprises, toujours sans succès.

Quant aux quatre autres plaignantes, si elles ont été entendues dans le cadre de l’enquête susmentionnée, nul ne leur a précisé à aucun moment si elles l’étaient au titre de «parties», de victimes, de témoins ou autre. Nous rappelons d’ailleurs que l’objet du mandat confié à l’enquêteur par la Municipalité n'était pas les plaintes des six victimes, mais des "difficultés de fonctionnement" générales, selon les déclarations de M. Wahlen le 31 janvier.

Pis, l’une des victimes a vu sa plainte retournée contre elle par la Municipalité et le Secrétaire municipal, se trouvant elle-même visée par ce rapport. Loin de chercher à établir les atteintes subies par cette personne, l’enquêteur a reçu pour mandat d’évaluer le manque de compétence que le Secrétaire municipal lui prêtait et qui justifiait à son sens le traitement qu’il lui avait infligé... L’enquêteur a établi par la suite que cette personne n’avait à répondre d’aucun manquement, les accusations à son encontre ayant été totalement balayées. Accusée à tort, elle n’a toujours pas reçu à ce jour de réparation, ni d’excuses.

Enfin, les plaignantes qui ont été entendues par l’enquêteur se sont dites étonnées par la teneur des questions, qui n’évoquaient pas directement le comportement du Secrétaire municipal ni l’objet de leurs plaintes, questions qu’elles ont décrites comme orientées et ciblant le chef du Service des ressources humaines. Ce dernier ne faisait pourtant l’objet d’aucune plainte. À l’issue de cette phase, certaines personnes se sont senties manipulées et trompées sur le contenu et les objectifs de la démarche. Contrairement à ce qui leur avait été personnellement communiqué et les annonces faites par la Municipalité par la voix du Syndic, l’enquête n’avait pas pour but de traiter leurs plaintes pour harcèlement. À ce jour, aucune des six plaignantes n’a été entendue en tant que plaignante pour les faits de harcèlement dont elles ont été victimes.

Par ailleurs, une autre personne de l’administration a été sanctionnée sans que son droit à être entendu n’ait été respecté. Or le droit d’être entendu est un droit constitutionnel : son non-respect par la Municipalité de Nyon est donc une violation d’un droit fondamental. Dans le journal «24 Heures» du 8 décembre 2021, le Syndic a en effet indiqué que des personnes seraient sanctionnées: «les fautifs seront sanctionnés sans être révoqués». Le Syndic annonçait la faute et la sanction dans le même temps, alors que selon nos informations, une personne (au moins) concernée par cette annonce non seulement n’avait pas reçu le rapport, mais ne savait pas ce qu’on lui reprochait ni avait pas été entendu sur les faits en question. La violation du droit d’être entendu est ici manifeste.

Obligations légales de l’employeur

Légalement, l’employeur a «l’obligation de protéger la santé et la personnalité» de ses employé.e.s. Il est incontestable que cette obligation légale n’a pas été respectée. Dans ce contexte, les appels à l’apaisement et à «aller de l’avant» ne peuvent pas être entendus.

Légalement encore, la Municipalité a l’obligation d’ouvrir une enquête lorsque des faits pouvant être constitutifs de harcèlement sont rapportés par des victimes ou par des témoins. Or, comme nous l’écrivons plus haut, l’enquête confiée à l’ancien juge Muller n’entre pas dans ce cadre. Là encore, la Municipalité n’a pas rempli son obligation légale.

Aujourd’hui, dans l’administration nyonnaise, le climat de tensions est évident, quoi qu’en dise la Municipalité. Nous savons par exemple que certains employé.e.s de la Ville ont l’interdiction formelle de parler avec d’autres employé.e.s, ce qui paraît totalement invraisemblable. Tout cela est en réalité symptomatique du climat et des méthodes utilisées à Nyon. Là encore, on est loin de l’apaisement proclamé.

Un audit mené par une amie proche

Lors de la séance extraordinaire du Conseil communal du 31 janvier consacrée à la crise, la Municipalité a annoncé des mesures de thérapie sociale et de médiation ainsi que le lancement de deux audits : l’un consacré au Service des ressources humaines, l’autre à celui de l’administration générale. Pour ces deux audits, la délégation municipale n’était pas mentionnée dans la communication au Conseil communal. Or selon nos informations, la Municipalité a décidé de nommer Mme S. Schmutz dans sa délégation. Or il est de notoriété publique que Mme Schmutz entretient des liens d’amitié étroits avec le Secrétaire municipal. Il est donc plus qu’étonnant que cette Municipale soit nommée pour auditer un service dont le chef est un proche. Enfin, concernant les mesures de médiation et de thérapie sociale, toujours selon nos informations, aucune d'entre elles n'a abouti pour l'instant. Cela limite fortement la valeur des démarches proposées et, de facto, la portée de ces mesures sur le climat nyonnais.

Toutes ces mesures visent-elles vraiment l’apaisement?

Rappelons encore que, sur les quinze dernières années et selon les informations recueillies par notre syndicat, une vingtaine de cadres et/ou chef.de.s de service ont quitté l’administration nyonnaise. Parfois avec des conventions de départ, parfois en démissionnant. Nous estimons le montant des indemnités versées par la Ville dans le cadre de telles conventions à env. 1,35 million de francs. Sur ces personnes, le taux de rotation des personnes travaillant de près ou de loin avec l’aménagement du territoire est particulièrement élevé puisque quatre titulaires se sont succédés à ce poste depuis 2008.

Enfin, il est impossible de ne pas faire le lien entre cette situation et le projet de suppression du statut et de son remplacement par un règlement du personnel porté par la Municipalité.

Un processus de négociations est en cours. Les employé.e.s de la Ville ont participé, en nombre, aux séances d’information organisées par les représentant.e.s du personnel. À leur issue, la délégation a remis à la Municipalité les points, nombreux, qui posent problème. Parmi eux, trois points sont inacceptables en l’état : la liste - littéralement infinie - de motifs de licenciement qui figure à l’article 12 du projet de la Municipalité. Cette liste contient des motifs parfaitement arbitraires de licenciement. Si la Municipalité refuse de revenir sur cet article, elle validera des motifs de licenciement aussi larges, qui n’existent à notre connaissance dans aucune autre administration.

D’autres points de ce projet de règlement sont problématiques : notamment au niveau des enquêtes administratives – un élément central du futur règlement, au vu de la manière de « gérer » les situations problématiques et les conflits au sein de l’administration nyonnaise, ou encore de l’égalité hommes-femmes en ce qui concerne la prise en compte des temps partiels sous plusieurs aspects.

La position du personnel sur l’ensemble du projet a été adressée à la Municipalité le 24 mars dernier. Cette dernière a affirmé son intention de ne plus organiser de nouvelles séances de négociation mais de procéder par échange de courriers. Elle doit maintenant répondre au personnel sur les nombreux points du règlement qui ne font pas l’objet d’un accord à ce stade. Nous attendons sa réponse dans les jours à venir. Une assemblée générale du personnel aura lieu le 5 mai prochain afin de permettre au personnel de se prononcer sur le projet de nouveau règlement.

D’ici là, dans les négociations sur le nouveau règlement comme dans la défense des intérêts du personnel de la Ville, le SSP reste mobilisé autour de cette crise qui n’en finit pas et déterminé à défendre les droits élémentaires du personnel de la Ville contre l’arbitraire.